Les élèves en difficulté

Des difficultés variées et complexes


Il ou elle sait lire. Cette assertion prend un sens différent en fonction de la situation ou de la personne dont on parle. Si on se réfère à un élève de 6-10 ans en milieu scolaire c’est une appréciation portée sur sa capacité à déchiffrer. Si on se réfère à un jeune en fin de scolarité, c’est une évaluation de sa capacité à traiter l’information écrite quel que soit le support. (Chartier, 2007 ).
Dans la logique de continuité où on considère que l’on apprend à lire tout au long de sa vie, les processus mis en œuvre pour cet apprentissage continué changent au fur et à mesure que les exigences évoluent et se différencient. Tout au long de la scolarité obligatoire, les parcours de lecture sont jalonnés d’étapes d’appropriation d’habiletés et de stratégies dans le but, d’une part, de favoriser la réussite scolaire car la lecture est un vecteur majeur pour les apprentissages et, d’autre part, pour satisfaire les appétences de connaissances, le plaisir de lire ainsi que les obligations de la vie sociale, domestique et citoyenne (Chartier 2007 ; Frier Guernier 2007 ; Nonnon 2007 ). La rupture scolaire entre l’école primaire et le collège est aussi une rupture dans les exigences de lecture. Lire au collège c’est être confronté à plus de complexité, à un langage peu connu et peu familier qui rend plus difficile la compréhension. Or, pour certains élèves, les compétences de lecture élaborées à l’école primaire sont partielles, certaines inachevées. Elles sont comme laissées en suspens, alors qu’un ensemble d’habiletés et de stratégies restent à construire dans le but de rendre l’élève autonome afin qu’il soit en capacité de se servir de la lecture pour les apprentissages. (Frier Guernier, 2007 )

De lecteur à non-lecteur (qui ne déchiffre pas) à l’école primaire, le collège classe souvent les élèves en lecteur, non-lecteur, mauvais/faible lecteur ou lecteur fragile, et, au lycée des enseignants parlent parfois d’élèves illettrés. Cependant les lecteurs en difficulté (terme retenu pour ce texte) ne constituent en rien un groupe homogène. L’acte de lecture est une activité cognitive et sociale complexe. Les difficultés rencontrées par les apprenti-lecteurs sont tout aussi variées et complexes. Il est donc essentiel de définir de quels lecteurs il s’agit, et de définir aussi précisément que possible les difficultés rencontrées. (Chauveau 2001 ; Gaté 2005 ; Goigoux Nonnon 2007 )

A la lecture de ce tableau et tout en croisant ces éléments avec des travaux d’observation et d’analyse d’autres chercheurs, il est possible de caractériser différents profils de lecteurs en difficulté afin d’identifier les éléments qui ont fait obstacle et de construire des activités de remédiation. Cependant il faut rester vigilant et approcher la singularité de chacun pour ne pas enfermer l’enfant ou le jeune dans une catégorie. "Il n’y a pas de mauvais lecteurs types. Il existe une grande variété d’histoires scolaires et de conduites face à l’écrit, et donc de modes possibles de retour à l’écrit. Entre les élèves à la scolarité lacunaire ou chaotique, ceux qui ont connu des ruptures biographiques, ceux qui ont tranquillement traversé les classes successives sans les perturber mais sans réellement prendre part au travail et se révèlent non lecteurs lors de changement de contextes scolaires, ceux dont les compétences sociales et langagières sont conséquentes malgré leur désintérêt de l’écrit et ceux qui rencontrent des limites dans tous les domaines cognitifs et langagiers… les différences de rapports à l’écrit et de façons d’apprendre sont considérables. " (Goigoux, Nonnon, 2007 )

L’ancrage des difficultés


L’ancrage des difficultés en lecture peut se situer dans l’ordre conceptuel, ce qui signifie que l’élève n’endosse pas son rôle d’apprenti-lecteur parce qu’il ne le comprend pas, de même qu’il peut ne pas comprendre les fonctions de la lecture et de l’écriture (Chauveau, 2001 ).
Certains élèves sont en impossibilité de lecture parce qu’ils déchiffrent trop lentement, ou bien parce qu’ils essaient de deviner en fonction du contexte sans vraiment déchiffrer, ou bien encore parce qu’ils se limitent à l’une ou l’autre de ces deux procédures alors que les deux sont nécessaires à tout acte de lecture.
D’autres encore sont en difficulté de lecture parce qu’ils s’efforcent uniquement à déchiffrer et n’essaie pas de comprendre, parce qu’ils ne décodent pas suffisamment de mots courant et sont accaparés par le décodage, parce qu’ils se limitent à une compréhension approximative de l’ensemble du texte ou bien encore parce qu’ils n’accèdent pas à une représentation d’ensemble du texte (Frier Guernier, 2007 ; Chartier, 2007 ).


Les difficultés au collège


A l’issue de l’école primaire certains élèves sont évalués comme sachant lire et pourtant ils deviennent des lecteurs en difficulté au cours de leur scolarisation au collège. Ce sont ceux qui ont développé des stratégies de compensation au prix d’une mobilisation cognitive importante. Or, les tâches de lecture au collège sont de plus en plus complexes car elles sont le vecteur des apprentissages. L’élève, alors n’a plus les ressources nécessaires pour faire face aux exigences de la réalisation de tâches complexes. L’effet palliatif de la compensation ne fonctionne plus et l’élève se retrouve, tout d’un coup, en grande difficulté (Frier Guernier, 2007 ; Chartier, 2007 ).

Au collège, ce sont donc de nouvelles habiletés et de nouvelles stratégies cognitives et métacognitives de lecture qui sont requises pour la compréhension d’un texte et les tâches inhérentes. En conséquence, les capacités de lecture sont amenées à évoluer. Un élève en difficulté manque de bases stratégiques, l’une des remédiations possible vise à faire prendre conscience à l’élève de sa stratégie dominante et de l’amener à en utiliser d’autres afin de concrétiser son acte de lecture, qui est, de comprendre ce qu’il lit.

Deux chercheures se sont intéressées à des collégiens qui savent lire mais qui déclarent ne pas aimer lire. La lecture est un acte relevant d’une appropriation individuelle, que se passe-t-il quand ces élèves en restent à la considérer comme une activité purement scolaire ? L’une des causes, prend racine dans les habitudes familiales qui n’intègrent pas de pratiques de lecture. Si, pour ces jeunes, il n’y a pas eu d’activités scolaires ou extrascolaires compensatoires, ils en restent au point constaté au CP de non familiarisation avec les pratiques de lecture.

En conclusion de cette partie, pour aider le jeune à investir ou réinvestir la lecture, nous reprenons les arguments énoncés par Elisabeth Nonnon: il est important de prendre en considération l’histoire singulière de lecteur de chacun, de s’enquérir du sens que le jeune donne à l’écrit tant en milieu scolaire que dans sa vie quotidienne. "Il s’agit de comprendre la genèse de ses difficultés, les facteurs qui ont amené des dynamiques négatives ou positives, des décrochements ou des réinvestissements, et qui ne sont réductibles ni à des causalités sociologiques approximatives et mécanistes, ni à des dénonciations trop sommaires de pratiques pédagogiques " (Nonnon, 2007 ). Il faut leur donner la parole pour comprendre les fluctuations d’investissement, les comportements paradoxaux dans le rapport à l’écrit, les décalages ressentis entre la valorisation de l’écrit à l’école et les pratiques personnelles qui sont indissociables d’une construction identitaire.

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